Individuellement, la crise que nous vivons et le long temps de confinement qu’elle nous impose nous donne l’occasion de nous connecter à nous-mêmes.
Dans l’essoreuse émotionnelle de ces quelques semaines, nous pouvons être vraiment à l’écoute de ce qui est essentiel pour nous, nous pouvons choisir sur quoi nous voulons investir de l’énergie, nous pouvons nous séparer de ce qui nous entrave. Cela nous demande de procéder à un examen critique de ce qui nous anime, nous agite même, de ce qui nous motive fondamentalement.
Plusieurs questions émergent.
Humainement, que voudra dire être en relation avec une personne ? Avoir toujours plus de contacts dans un même lieu ? Mais avec quelle profondeur vs quelle superficialité ? Quelle place y-t-il pour chacun dans un tout ?
Est-il nécessaire de se serrer la main, de se faire la bise, de se toucher pour se saluer ? Quel intérêt de faire un geste si c’est en regardant ailleurs, en n’étant pas présent ?
Regarder droit dans les yeux, c’est accueillir l’autre, c’est le reconnaître en tant que personne.
Que signifie être en lien ? Il est tout à fait possible d’être relié.e aux autres sans être physiquement avec eux. Dès lors que les échanges sont attentifs, centrés sur l’essentiel, les messages écrits et vocaux, les appels et les vidéoconférences constituent un lien. Ecoute, bienveillance et empathie sont indispensables au lien. Un intérêt sincère pour l’autre dans sa singularité également.
Que signifie être vivant ? Comment chacun l’éprouve-t-il ? Et même, quel est le prix de la vie ?
Ce sont sans doute des questions lancinantes du début du confinement.
D’abord la sidération due au changement très brutal des habitudes, à la perte des repères et des rituels personnels, familiaux et professionnels.
Et l’inquiétude quant à un futur à l’échéance inconnue, la peur pour sa santé et celle de ses proches. La peur de son futur professionnel, financier, voire de son présent.
Rester figé.e, chercher des informations, inexistantes, partielles.
Trouver un fil pour pouvoir agir : mettre en place le télétravail (quand le métier le rend possible), organiser l’enseignement, réaliser les démarches administratives possibles…
Et se demander, avec toujours plus de force : que signifie être vivant ?
Qu’est-ce qui fait que chacun se sent vivant ?
Qu’est-ce qu’être libre, se sentir libre ? A quel point est-ce important, essentiel, vital ?
Agir librement, c’est prendre soin de soi, autant que faire ce peut. Et en plus, cela permet de contribuer à prendre soin des autres. Consentir à l’absence de liberté de mouvement revêt une grande valeur. Cela sauve des vies.
Être libre, c’est libérer son esprit de la panique, des pensées négatives qui empêchent toute réflexion. C’est accueillir en soi, précieusement présentes, ses pensées, ses valeurs. C’est leur donner une large place.
Être conscient.e de ce qui est essentiel pour soi, de ses ressources intérieures est un des moyens pour renforcer sa liberté.
Ces jours et ces semaines hors du monde d’avant sont un temps précieux pour imaginer son monde d’après et s’y préparer.
Discerner ce qui, dans le monde d’avant, est essentiel, important et superflu, demande de se mettre attentivement à l’écoute de soi-même.
Dans les actions et les interactions, quelles sont celles qui sont réalisées pour soi ? Pour se faire vraiment plaisir ? Quelles sont celles qui répondent à une norme sociale, à une injonction ?
Quitter le monde d’avant, c’est se libérer du poids des normes et des injonctions, c’est se mettre « JE » au centre du « JEU ». Pas par égoïsme, du tout. Par engagement. Pour prendre soin de soi-même parce que personne d’autre que soi ne peut le faire. Parce qu’aller bien, c’est envoyer aux autres un signal positif qui peut leur permettre de changer de point de vue sur eux-mêmes.
Cette crise exige énormément de conscience de soi et de présence, ici et maintenant, à soi.
Mettre en œuvre efficacement les gestes barrière par exemple requiert d’anticiper chaque geste pour les enchainer au mieux. Cela demande même d’être complètement concentré sur la réalisation du geste lui-même, au moins le temps qu’il devienne un nouveau réflexe.
Cette crise est une invitation à une grande prise de conscience de tous les automatismes qui président au quotidien. Des automatismes physiques bien sûr. En allant plus loin et en se tendant un miroir à soi-même, des automatismes comportementaux et psychologiques.
C’est dans ce domaine qu’il y a beaucoup à passer au crible pour se libérer de ce qui n’a pas lieu d’être parce que cela ne correspond à l’individu dans son unicité. Le danger serait de rester identique en sortie et en entrée, sans avoir choisi. L’opportunité c’est de se trouver, de se faire naître un peu ou beaucoup. Les ressources existent en chacun. Tirer parti du temps dans la chambre de travail permet de se les (ré)approprier pour les rendre accessibles.
Pour tirer profit de ces quelques semaines, il est peut-être temps de faire appel à un révélateur pour accoucher de soi-même.
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